Discours
prononcé par
Monsieur André SANTINI
Maire d’Issy-les-Moulineaux |
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Monseigneur,
Monsieur l’Ambassadeur de Pologne en France,
Monsieur le Recteur,
Mesdames, Messieurs,
Mes Chers Amis,
Le Père Jerzy POPIE£USZKO était un défenseur de la démocratie. Pour
vous tous, ici présents, c’est une évidence.
Son combat au quotidien fut celui de la justice considérée comme mère
de liberté. Il a toujours exprimé sa foi simplement, en appelant au
calme les fidèles meurtris par la brutalité du régime dans lequel ils
vivaient.
20 ans se sont écoulés depuis son arrestation le 19 octobre 1984 et je
veux rappeler ses dernières paroles prononcées lors de la célébration
d’une messe à Bydgoszcz le jour même de sa disparition : « Prions afin
d’être libérés de la peur et des menaces et, surtout, délivrés de tout
sentiment de haine et de vengeance ».
Ces quelques mots résument à eux-seuls l’esprit de son combat. Ils
résonnent encore dans le chœur des églises de Pologne et ici-même.
Le 28 février 1985, quatre mois à peine après la tragédie, le Conseil
municipal de la Ville d'Issy les Moulineaux décida, unanimement, de
donner le nom de Jerzy POPIE£USZKO à une allée de ce square.
Lorsque le Président DEMBINSKI, avec le soutien des autorités
polonaises en France et du groupe d’amitié France – Pologne à
l’Assemblée nationale, proposa d’implanter un monument dédié au prêtre
de Varsovie, je n’ai pas hésité à accepter.
Ainsi, le 17 octobre 1992, la Ville d'Issy les Moulineaux fut la
première Ville de France à rendre un hommage à ce martyr polonais en
érigeant à sa mémoire, cette statue réalisée par Jacques CHAUVENET.
Ses deux poings joints vers le ciel en une vigoureuse prière
accrochent toujours l’attention des passants.
L’emplacement même de cette statue constitue un symbole puisqu’elle
est située en bordure du Parc Jean-Paul II, qu’Issy-les-Moulineaux a
eu le privilège d’accueillir en 1980.
C’est un honneur et une immense émotion pour moi de commémorer le
20ème anniversaire de la disparition du Père Jerzy POPIE£USZKO.
Je suis particulièrement touché de la présence de Monsieur TOMBIÑSKI,
Ambassadeur de Pologne en France et de Monseigneur JE¯, recteur de la
mission catholique Polonaise en France.
Soyez assurés, Messieurs, que les Isséens sont honorés de vous compter
parmi eux. En leur nom, je vous en remercie profondément.
Le Père POPIE£USZKO était un homme d'engagement, au service d'un idéal,
celui de la liberté de ses compatriotes, au nom d'un amour passionné
de la Pologne.
Dans l’exercice de ses missions, il s'est donné sans compter pour son
pays. Sa vie nous le rappelle à tous aujourd'hui : l'engagement, c'est
aller au bout de ses convictions ; et c'est assumer tous les risques.
Le Père POPIE£USZKO a choisi le combat de la vie, le combat de cette
Pologne qui ne voulait pas mourir plutôt que la compromission. Il n’a
jamais été résigné et exaltait son courage pour mieux affirmer son
identité, celle d’un homme de Liberté, d’Egalité.
Dans un pays où la religion est la base de l’unité nationale, il s’est
battu car il avait honte que son pays soit ainsi livré à la haine et à
l’intolérance.
Le risque, il le prit dès le mois d’août 1980, en célébrant une messe
dans une usine, au milieu des ouvriers de Gdansk.
Dés lors, cet engagement auprès des ouvriers de Solidarnosc fut sans
réserve, au point qu’il devint très vite le porte-parole de tout un
peuple.
Le Père POPIE£USZKO était un homme de fidélité, un homme d'idéal et de
sang-froid qui agissait avec élégance, éthique et conviction.
Ce prêtre, dont tous louaient la douceur et la gentillesse, ne recula
devant aucune menace. Il fut sur tous les fronts, sans relâche pour
lancer le mouvement, accélérer, anticiper.
Il le faisait au péril de sa vie, car les services de sécurité du
Ministère de l’intérieur polonais le menaçaient, le suivaient jour et
nuit, l’interrogeaient, fouillaient son appartement, découvraient, un
jour, des tracts et des armes sous son lit…qu’ils y avaient placés.
D’un naturel calme, le Père POPIE£USZKO résistait, avec autant de
sérénité qu’il est possible, aux persécutions orchestrées par cette
police : troubles à la sortie de ses messes, enregistrements de toutes
ses homélies,…
Malgré la fatigue physique et morale, le Père POPIE£USZKO exprimait
sans peur ce que d’autres étaient incapables de dire.
Il ne prêchait jamais la violence comme en témoigne cette parole
prononcée lors d’un office : « ne luttez pas par la violence, elle est
un signe de faiblesse ».
Il calmait les esprits et ne transigeait sur aucune des revendications
de peuple polonais. Avec ténacité, il éclairait simplement les
résistants contre les abus du pouvoir communiste en place.
Courageux, il alla, le soir de Noël 1981, jusqu’à partager avec les
Zomo (la police politique) qui n’en crurent pas leurs yeux, le pain de
l’amitié, selon la coutume polonaise !
C’est cette même police qui, le 19 octobre 1984, appréhenda le Père
POPIE£USZKO, provoquant une émotion dans toute la Pologne. Durant une
dizaine de jours, espoir, colère abattement alternèrent dans les
esprits.
En réalité, le père POPIE£USZKO fut bâillonné, ligoté, roué de coups
puis ficelé dans un sac que ses tortionnaires jetèrent dans la Vistule
sans même s'assurer que leur victime était réellement morte. Son corps
sera retrouvé le 30 octobre 1984.
Les seuls témoins du meurtre - les assassins eux-mêmes – laissèrent
tellement de traces de leur massacre que le gouvernement fut contraint
d'ouvrir une enquête et de les faire condamner.
Aujourd'hui, l'église où officiait le prêtre-martyr est un lieu de
pèlerinage. Les fidèles y déposent des photos, des peintures naïves et
des ex-voto en tous genres.
Sa tombe, qui reçoit la visite de millions de pèlerins polonais et
étrangers, est devenue le lieu d'un culte spontané, durable et
authentique.
Nous pouvons dire aujourd’hui que l'émotion et les protestations que
la mort du Père POPIE£USZKO a provoquées ont incontestablement
contribué à accélérer la chute du régime communiste en Pologne.
En commémorant le 20ème anniversaire de sa mort, la Ville d'Issy les
Moulineaux célèbre ainsi, aussi, la libération de la Pologne du joug
de la dictature. Que ce jour soit donc un jour de joie, la joie de
savoir la Pologne aujourd’hui pleinement intégrée à l’Europe.
Nous autres, Français, n’avons pas assez manifesté cette joie en
janvier dernier. La Pologne est un pays ami. Sachons nous en souvenir
!
Cette adhésion à l’Union Européenne est, je crois, porteuse de tous
les espoirs et de toutes les valeurs du Père POPIE£USZKO : l’égalité,
la justice, la liberté.
N’est-ce pas là le meilleur hommage que nous puissions lui rendre ?
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